À 62 ans, il reste l’un des personnages les plus singuliers de la musique américaine, malaxant sans cesse les nombreuses racines sonores du continent et restant toujours contemporain.

Bad as Me, son premier album de chansons originales depuis sept ans, le trouve en grande forme vocale. C’est-à-dire grognant, grommelant, fulminant, de son inimitable voix d’ogre. Mais il peut également oser le falsetto sur un titre soul, ou sonner comme s’il sortait du lit, la tête encore embrumée.

Les deux premiers singles posent le cadre de l’album. Bad as Me, le morceau, tourne sur un piano bastringue, un sax baryton barrissant, un harmonica blues, bruits de guitare écorchés et une voix dingue, comme en pleine crise de démence alcoolique. Un cousin du fameux I Put A Spell on You de Screamin’Jay Hawkins Au contraire,Back in the Crowd est une tendre ballade classique centrée sur une guitare acoustique et une voix bourrue mais émouvante.

Depuis trente ans, l’épouse de Waits, Kathleen Brennan, coécrit ses chansons, et c’est l’une des clés de la qualité de ses albums. Tout comme le choix des musiciens : Marc Ribot (guitares), Casey Waits (batterie), Charlie Musselwhite (harmonica) sont le coeur d’un groupe changeant qui peut accueillir des amis prestigieux comme Flea ou Keith Richards.

Les meilleurs albums de Waits combinent dinguerie et une dose d’absurde à des mélodies aux contours classiques. Bad as Me est bien l’un d’eux.