Bruno Green
THE BLUE VOID TRILOGY
Quatorze années de carrière, trois albums, quelques Ep, un film documentaire,Cruising the Dream, réalisé en 1994, lors d’une traversée effrénée des Etats-Unis, unrecueil de textes et de nombreuses collaborations avec d’autres artistes en tant quemusicien, ingénieur du son et producteur, auront finalement ramené Bruno Green versses premières influences country-folk.
Creusées, digérées, tamisées, elles constituent l’essence de The Blue Void Trilogy,projet aussi ambitieux que conséquent, lancé en 2003 par ce musicien qui se déclarevolontiers « boulimique », et qui doit autant au cinéma ou à la littérature qu’à lamusique, avec des références avouées du côté de John Ford, William Faulkner, JohnSteinbeck, mais aussi Woodie Guthrie, Neil Young ou encore Uncle Tupelo.
Horse mood, premier volume de cette trilogie, explore les recoins et aspéritésrustiques de cette culture, avec un intérêt pour la mythologie de l’Ouest américain quiconfine à l’obsession. Bruno Green n’en finit plus d’observer, pour mieux les démonter,les origines et les rouages de cette société qui aura fini par envahir le monde (au proprecomme au figuré). Textes et musiques évoquent, avec une poésie qui rappelle CormacMac Carthy ou Charles Frazier, la vie quotidienne de générations conquérantes payée parle sang, la sueur et le désespoir, mais également la prégnance de la religion, de lapolitique et des luttes sociales.
L’enregistrement du deuxième volume, God’s country, en février 2005, voitl’arrivée au sein de la formation réunie au Cocoon studio, de Pascal Humbert et BillyConway, respectivement bassiste de Sixteen horsepower et batteur de Morphine. Le sondu groupe évolue et celui-ci livre un album plus brut, plus immédiat et réveille surcertains titres le fantôme de Bob Dylan, période Time out of mind. Une surprise tantinattendue qu’assumée. Les guitares tranchantes de Goulven Hamel dessinent descontours violents aux rythmiques du tandem américain, pendant que la voix habitée deBruno Green continue de peindre le sort de ces pauvres gens ne trouvant leur salut quedans une perpétuelle fuite en avant et la quête d’un avenir ou d’un haut delà plusfavorables.
Récemment, reconnu et co-opté par la nouvelle scène folk-américanabostonienne*1 et le label Hi’n’dry*2, Bruno Green a récemment bouclé son sac devoyageur infatigable et finalement rejoint la terre natale de sa musique. Là,(Cambrige–Massachussets) il enregistre actuellement ce qui constituera le troisièmevolume de sa trilogie, Father & son, sous la direction artistique de Billy Conway*3.Entouré des musiciens du collectif Table Top People et de références de la folk américainecomme Jennifer Kimball, Sean Staples ou Jimmy Ryan, Bruno Green continue d’exploreret de construire son univers particulier fait de country-folk poussiéreuse, de poésie sansage et d’images aussi belles qu’inquiétantes, chargées d’une histoire plus ou moinslointaine qui ne nous est pas, sans être américains, tout à fait étrangère.
Peu soucieux de rentabilité commerciale, peu enclin à l’exposition de sa personne, BrunoGreen poursuit sa route en dehors des sentiers battus, loin des autoroutes consuméristeset médiatiques, pour le bonheur d’un petit nombre d’initiés . Il n’a jamais satisfait auxtrop répandus soucis chroniques de modernité, ni humé l’air du temps et sacrifié auparfum du jour. Car il a son univers, ses visions qui suivent le rythme de cette petite musique intérieure qui nous mènent jusqu’à lui. De poésie électrique en bois de guitares,il a su trouver une place à part dans ce désert qu’il explore et où l’on cohabite.
On ne fera pas l’affront de dire que c’est rare. On dira juste que c’est précieux.
Bruno Green est une star pour ceux qui le connaissent, tant sont évidentes la beauté desa voix et la valeur de son univers musical. Débutant ses activités en 1990, il aenregistré plusieurs albums raffinés mais méconnus, quitté le label qui l’avait signé sanspour autant interrompre sa quête artistique. S’il ressent un peu d’amertume, il ne lemontre pas et se dit fier « de poursuivre sa petite activité artisanale » : il a de quoi l’être,car ses disques sont superbes, et que ce soient des autoproductions ou de petitesproductions ne retire rien à leur valeur. Un exemple de comportement réconfortant pourtous les groupes.
Hervé Moisan / Rock & Folk / 2004
Depuis une bonne quinzaine d’années, Bruno Green multiplie les projets à l’envi. Encongé provisoire de Santa Cruz, dont on attend le second enregistrement, il s’attelle ensolo à un triptyque dont l’ambition est de s’approprier l’esprit de la country-folk qui collesi bien à l’Ouest américain. Le premier volet esquisse à merveille ce décor si familier,récemment sublimé par Calexico, tout en imposant une vision personnelle del’americana, critique et généreuse. La musicalité, sobre et raffinée est un purravissement. Les contributions de Thomas Belhom (qui nous a récemment gratifié d’uneoeuvre similaire avec « Remedios ») à la batterie et à l’accordéon, d’Olivier Mellano à laguitare et de Laetitia Sheriff au chant sur « Ferriswheel » et « Lean & bitter » sont unevéritable aubaine pour ce « Horse mood », très évocateur, dont on ne parvient pas àdécoller l’oreille.
Alain Birmann / Longueur d’Ondes / 2004
Bruno Green enregistre son quatrième album solo pendant une pause du collectif SantaCruz. Occasion idéale pour ceux qui ne connaissent pas encore ce chanteur guitaristehors pair de savourer son « blues » bouleversant. Pour ce disque qui traduit une fascinationpour la mythologie de l’Ouest américain et qui n’est que le premier volet d’une trilogie, ils’est entouré de musiciens aussi brillants que lui – on retrouve parmi eux Olivier Mellano- et se replonge dans ses premières amours country-folk.
Hervé Moisan / Rock & Folk / 2004
« Horse Mood » fait partie de ces petits classiques hexagonaux qui tombentmalencontreusement dans une indifférence un peu générale. Mais peut-être quel’activiste qu’est Bruno Green s’en fiche, lui qui se bat pour une diffusion différente de lamusique, hors des canaux traditionnels et dans laquelle la gratuité aurait sa place. BrunoGreen est d’ailleurs l’un des chefs de file des inusables Santa Cruz qui mettent en lignesur leur site avec une insolente régularité de somptueux morceaux inédits. Ainsiespérons que la musique de Bruno Green circule de bouches à oreilles et gagne enmythe. Il signe ici son propre album, aidé par certains de ses comparses de Santa Cruzcomme Thomas Belhom dont on ne se rassasie pas du jeu de batterie toujours plusmusical, Jacques Auvergne, Olivier Mellano, Yves-André Lefeuvre et la désormaisrenommée Laetitia Shériff. Ils rêvent toujours de déserts américains, de motels esseulés,de convois ferroviaires à n’en plus finir, de chevauchées sauvages et composent la BO deces rêves par le biais d’un folk à mi-chemin entre tradition et nouvelle scène. L’emploi dela pedal-steel évoquerait le ressuscité « On The Beach » de Neil Young quand la retenuedes compositions et leurs digressions suggéreraient plutôt Giant Sand, Sparklehorse ouBlack Heart Procession. Mais pourquoi évoquer de trop lourds héritages quand leschansons de Bruno Green se suffisent à elles-mêmes ? Ses morceaux évoquent àmerveille l’entre-deux, la douce léthargie, ce sentiment de vague à l’âme mêlé à un désird’exploration. « Horse Mood » est un album constamment sur le départ mais prônel’immobilité. Le départ et l’immobilité constituent les deux fils directeurs de l’album àtravers des chansons telles que « Riding to my death », « Down sunside », « Lean and bitter »ou « Golden Dust ». A cet égard, « Horse Mood » pourrait être le pendant musical de « TheBrown Bunny » de Vincent Gallo. Le voyage n’est ici en rien initiatique, il n’est qu’unretour à un point de départ. Lorsque Bruno Green décide de mettre les voiles, c’est doncsur le dos d’un cheval mort qu’il le fait. Quand la pedal-steel dessine des paysagesgrandioses, le chant déprimé de Bruno Green nous fait redescendre sur terre. La beautéet la désolation ne font qu’un.
C’est banal, mais la façon dont le chante Bruno Green force l’admiration.
Pop News / 2003
Si Riding to my death, le titre qui ouvre ce disque, transperce par une fulgurance vocalequ’on jurerait empruntée à un Bob Dylan qui aurait bien vieilli, il reste évident que BrunoGreen chevauche sa monture en solitaire tout en restant proche du ranch Santa cruz.Peut-on d’ailleurs vraiment parler de disque solo puisqu’on retrouve ses compères Yves-André Lefeuvre et Pierre-Vital Gérard. Ce ne sont d’ailleurs pas les seuls invités puisqu’ona également la charmeuse Laetitia Shériff et son guitariste Olivier Mellano (auparavantcroisé avec Miossec et Dominique A, mais aussi au sein de son projet Mobiil). Cettejoyeuse bande s’en donne à coeur joie lorsqu’il s’agit de piétiner les plates-bandes d’unemusique de grands espaces qui s’exprime paradoxalement au mieux dans uneinstrumentation intimiste. Si ce n’est une pedal-steel ou un clavier par-ci par-là c’estsurtout l’ensemble qui marque par sa concision et sa cohésion : on trouve bel et bien desguitares plutôt expérimentales sur On a rope mais ce n’est pas pour autant qu’elles sontau premier plan. Que les compositions s’imposent en longueur où qu’elles aillent àl’essentiel, il est bien rare d’y entendre un refrain répété plus de deux fois. Chez BrunoGreen, le mot pop n’a pas encore été intégré au dictionnaire. Mais a-t-on besoin deconnaître un tel mot quand on a déjà digéré son manuel du parfait song-writer. Remplide mélodies et d’intentions modestes mais efficaces, ce Horse Mood, premier albumd’une trilogie annoncée, sera loin de vous mettre de mauvais poil. Pour s’en convaincre ilsuffit de se passer le tragique Lean & bitter dont les arpèges arides et les choeursmerveilleux de Laetitia Sheriff risquent fort de faire résonner leurs notes dans votre têtebien après la fin du morceau.
Eric / i-n-f-r-a.net / 2003