Dream Brother
THE SONGS OF TIM & JEFF BUCKLEY
C’est rare qu’une compilation débute avec un titre exclusif de l’un des groupes dont on parle le plus en ce moment (The Magic Numbers). C’est encore plus rare d’avoir un album d’exclusivités enregistrées par d’autres grands tels queSufjan Stevens, The Earlies, Kathryn Willams, Micah P Hinson, Adem, etMatthew Herbet. Et quand on réalise qu’il s’agit en faite de reprises des meilleures chansons écrites par Tim et Jeff Buckley, c’est comme si c’était Noël et votre anniversaire à la fois.
Les « Tributes » albums sont supposés être faciles, peu contraignants, souvent comme un temps de récréation pour les musiciens. La formule est gravée dans la pierre depuis des années: choisissez une icône vénérée, de préférence culte ; réunissez des chanteurs et des groupes qui n’éprouvent rien d’autre que le plus grand respect pour cette icône ; calmez les ardeurs des débutants ; assurez vous que tous reproduisent les œuvres de manière fidèle. Aussi tôt dit, aussi tôt fait ! Il n’est donc guère étonnant que les magasins de disques regorgent de ce type de compil sans intérêt, redondantes ou, tout simplement ordinaires et faignantes.
Dream Brother, est heureusement l’exception à ces compils dépourvues d’originalités. Tim Buckley et son fils Jeff font maintenant partis de la mythologie du Rock : maîtres dans la voix de l’octave bondissant, une musique fusionnelle presque inqualifiable, l’intensité, l’âme sensible. Le débat sur les similarités entre père et fils fait rage : l’abandon du père d’un fils qu’il ne connaîtra guère mais qui se rejoignent dans des morts soudaines (Tim à l’âge de 28 ans, d’une overdose d’alcool et d’héroïne en 1975 ; Jeff à 30 ans, d’une noyade accidentelle en 1997). Mais il n’y a pas de doute sur leurs similitudes en matière de musique : l’obstination, la quête acharnée pour la transcendance dans l’art, le refus de s’abandonner à la facilité envers eux-mêmes et leur public.
En ce sens, Dream Brother est un modèle de « tribute ». Il est clair que les groupes et song-writers anglais et américains qui ont contribué à ce salut unique et commun à la musique des Buckleys, aiment et respectent cette musique. Ils sont heureux ( et pas accablés) de remanier les choses autant qu’ils le peuvent. Même leurs fans les plus loyaux (tels que : Rufus Wainwright, Starsailor, Elvis Costello, Badly Drawn Boy, et Norah Jones, et tant d’autres) rencontreront peut être des problèmes pour reconnaître certaines de leurs chansons préférées. Sufjan Stevens transmute le caractère chaste de la chanson de Tim «She Is» en développant le potentiel « madrigal » de l’original ; Matthew Herbet démantèle complètement la chanson « Everybody Here Wants You » , tandis que le duo folk-electronica Tunng retravaille avec un étrange bidouillage la chanson de Tim et du parolier Larry Beckett commentant la guerre du Vietnam « No man can find the war ». Entre les mains de Engineers, « Song To The Siren », qui est maintenant une marche triste vers la mer, porte moins sur l’agonie et le destin que sur l’abandon. Les interprétations des titres de Jeff « Mojo pin » et « Grace », par King Creosote et Adem, transforment les originaux en balades folk usées, apportant des nuances jamais entendu auparavant.
Dans un sens, cela honore l’héritage des Buckleys et le change sérieusement, cet album est un testament aux legs qu’ont laissé Tim et Jeff dans leur sillage. Où qu’ils soient, on se plaît à imaginer que les Buckleys écoutent cette compilation, se demandant pourquoi certaines chansons ont été choisies et d’autres omises, pourquoi certaines ont été réarrangées de certaines manières …révélant ainsi la versatilité de l’ensemble. Ils n’auraient pas fait les choses autrement.
Cette note a été écrite par David Browne, auteur de Dream Brother : « The Lives And Music Of Jeff and Ttim Buckley » qui sera disponible pour des interviews.