La résurrection des icônes de la soul par les musiciens d’aujourd’hui est devenue une pratique courante qui accouche parfois de purs moments de grâce. On se souvient avec émotion de la renaissance de So lomon Burke – disparu la semaine dernière -, orchestrée par Joe Henry, et du retour de flamme de Bettye LaVette. Et voici que Mavis Staples, que Prince avait prise sous son aile à la fin des années 1980, revient en majesté et retrouve l’inspiration divine sous la houlette de Jeff Tweedy et de son groupe Wilco. Forte tête et voix magique des Staple Singers, menés à la baguette par son père, Pops, Mavis fut une pasionaria du mouvement des droits civiques et une des chanteuses les plus marquantes de la soul des années 1960, qui croisait les teintes de la mode rock et folk avec la musique des églises noires américaines. Contrairement à Prince qui tentait de calibrer sa voix pour en faire sa diva funk, Jeff Tweedy lâche la bride et remonte aux sources originelles.Enregistré dans la force du troisième âge (71 ans), You are not alone est un disque qui flotte magnifiquement entre les époques et saute avec une énergie démente et une aisance insolente du blues au rock, des hymnes gospel aux chansons de Randy Newman, Jeff Tweedy ou John Fogerty. Le chant de Mavis Staples, son grain rugueux, ses replis soyeux et ses passages en force y sont bien sûr pour beaucoup. Mais la beauté de ce disque (très) électrique tient dans la simplicité de ses arrangements, le charme des enluminures, le tranchant des musiciens, la concentration de Wilco qui se cale avec un plaisir évident dans l’allure de la dame. On croirait retrouver l’âge d’or des années 1960, où la jeune scène rock de Memphis se mettait au service des doyens du blues. Comme le chante Mavis, plus de soixante ans après ses débuts dans l’orchestre familial :« Je fais partie du groupe, alléluia ! »


1 CD Anti/Pias.


Album à écouter sur teleramaradio.fr le 24 octobre à 15h et 21h.